Éléonore Roussel, médaille de bronze du CNRS, une trajectoire à la vitesse de la lumière

Des systèmes miniaturisés permettent d'observer le comportement des électrons sans quitter l'université

Chercheuse spécialisée en physique des sources de lumière, basée à la Cité scientifique à Villeneuve-d’Ascq, Éléonore Roussel a obtenu récemment la médaille de bronze du CNRS, une reconnaissance pour la qualité de ses travaux dont les applications pourraient faire avancer la recherche dans de nombreux domaines.

Une « locale » à l’université de Lille. 

Ils ne sont pas si nombreux que ça, les chercheurs basés à l’université de Lille qui ont suivi tout leur cursus scolaire dans la région. Éléonore Roussel est une vraie enfant de la métropole lilloise : elle est allée au lycée Saint-Jude d’Armentières et souhaitait devenir orthophoniste… « Mais j’ai raté le concours », sourit-elle. Cette scientifique dans l’âme qui a « toujours été fan des bidouillages » s’est donc tournée vers la physique où elle a finalement « rencontré des enseignants très intéressants qui m’ont donné envie de poursuivre dans cette voie ».

Un parcours à la vitesse de la lumière. 

Après avoir soutenu sa thèse en 2014, elle postule pour la première fois au CNRS (Centre national de la recherche scientifique) en 2017… Un coup d’essai qui s’avère être un coup de maître : « Je pense que les travaux que je menais sur la physique des accélérateurs étaient porteurs », explique-t-elle modestement. La médaille de bronze du CNRS qu’elle a obtenue en fin d’année dernière est également une récompense arrivée rapidement, mais qui ne fait pas perdre la tête à la jeune chercheuse. « C’est un prix individuel qui récompense un travail collectif. Dans la recherche, on ne peut rien faire tout seul ».

Recherche fondamentale. 

Éléonore Roussel travaille sur les longueurs d’ondes extrêmes de la lumière, et la déformation des paquets d’électrons dans les lasers les plus puissants. « Lorsque des électrons circulent à des vitesses extrêmes, ils peuvent produire de la lumière, appelée rayonnement synchrotron. Mes recherches visent à stocker le plus d’électrons dans un petit volume afin de produire un rayonnement très intense avec une stabilité optimale. L’étude des phénomènes instables apparaissant dans ces paquets d’électrons nous permet d’avancer dans la maîtrise de ces rayonnements lumineux. », résume-t-elle. Les résultats de ces recherches permettent l’amélioration des systèmes d’imagerie, dans les domaines du médical ou de l’ingénierie, en permettant un gain de précision.

À la recherche des accélérateurs. 

Pour mener ses recherches, Éléonore Roussel dispose de matériel de base dans les laboratoires de la Cité scientifique, mais bénéficie également de créneaux sur des synchrotrons et des lasers parmi les plus puissants du monde. Des travaux qui l’emmènent souvent en Italie ou en Allemagne… « Il y a un gros réseau de collaborations au niveau européen sur ces questions de physique des accélérateurs. Comme nous travaillons sur la source même et non sur les applications, nous disposons de créneaux très serrés, au maximum de 8 heures. À chaque fois qu’on prépare une expérimentation, il y a un grand stress ».

 

La médaille de bronze

Selon la définition du CNRS, « la médaille de bronze distingue les travaux consacrant des chercheurs et des chercheuses spécialistes de leur domaine, et dont les recherches sont déjà bien engagées et fécondes. » Plusieurs médailles de bronze (selon les spécialités) sont remises chaque année, mais cette distinction reste exceptionnelle et vient saluer des travaux d’une qualité supérieure.

La crise du coût de l’énergie frappe aussi les scientifiques

Les lasers extrêmement puissants qu’Éléonore Roussel et son équipe utilisent pour leurs recherches sont très gourmands en électricité, et les opérateurs de ces systèmes n’échappent pas à la crise. « Certains créneaux d’utilisation des lasers en Europe, notamment en Italie ont été fermés pour cause d’économie », explique-t-elle. L’une des solutions pour contourner ces difficultés est la miniaturisation des équipements nécessaires à l’observation des phénomènes induits par la lumière… Un domaine sur lequel travaille également Éléonore Roussel, et qui pourrait aboutir à la mise en place « d’accélérateurs tenant sur quelques dizaines de mètres, et pouvant donner des résultats comparables aux plus grands équipements. Cela permettrait de mener des études plus simplement, au niveau de l’université ».